MOULTAKA APICULTURE ET PHYTO-APITHERAPIE

Fausse teigne

                                              La fausse teigne
                                                
                                             
 
jeudi 19 octobre 2006
par David   lien :  http://gdsa27.free.fr/spip.php?article104

La fausse teigne est bien connue des apiculteurs, qui font toujours un jour ou l'autre connaissance avec elle : soit lors de la conservation des cadres de hausses en dehors des périodes de miellées, soit en découvrant des colonies atteintes ou détruites par la fausse teigne. On peut se demander s'il est bien utile de parler d'un problème si banal, mais quelques points important méritent d'être mis en lumière. Le premier est son impact économique. Aux Etats Unis, on estime en effet que la fausse teigne provoque autant de pertes financières que la Loque américaine.

 

Le cycle de la fausse teigne : petite larve deviendra un beau papillon

Il y a en fait deux espèces de fausse teigne : la grande fausse teigne Galleria mellonella, plus fréquente et la petite fausse teigne Achroea grisella. Les deux espèces provoquent le même type de dégâts et à moins d'être entomologiste distingué, cette distinction n'a que peu d'intérêt pratique.

Le développement de ces papillons peut être simplifié de la manière suivante :

 

                          

Cycle de Galleria melonella, d'après Charrière J.D. et Imdorf A.

                            

  

  • Les papillons adultes vivent très peu de temps (quelques jours), n'ont besoin ni d'eau ni de nourriture. La taille de l'adulte de Galleria melonella est de 2 cm environ, celle de Achroea grisella de 1 cm environ. Leur existence est vouée à la reproduction, qui a lieu dans les arbres à proximité des ruches. Les femelles s'introduisent (le soir ou la nuit généralement) dans la ruche (rarement loin, le plus souvent très près de l'entrée de la ruche). Elles pondent dans les coins sombres et les anfractuosités du bois de la ruche, hors d'atteinte des ouvrières. Les grappes d'œufs (jusque 150 par grappe) sont très difficilement visibles à l'œil nu. Ils ressemblent à une olive blanc rosée de ½ mm .
  • Les œufs éclosent et la petite larve qui est libérée se nourrit et grossit TRES rapidement (les 10 premiers jours, si les conditions sont favorables, elle double chaque jour son poids). Cette larve - une ogresse donc - se nourrit de la cire des cadres, du pollen, du miel et des résidus de cocons qui restent au fond des alvéoles après plusieurs générations d'abeilles. Rarement, elle peut dévorer des larves d'abeilles. Elle creuse des galeries et tisse un réseau de soie qui la protège des ouvrières (cf. photo ci dessous).

 

                               

  • La larve tisse au bout de son développement un cocon sur le bois des cadres ou la caisse de la ruche. Au sein de ce cocon elle se transformera en un papillon adulte, qui sera libéré quelques jours après, qui volera vers de meilleurs cieux, un compagnon (ou une compagne) et de nouvelles ruches.

Quelques points intéressants :

  1. Après la mort d'une colonie, condition la plus favorable au développement des larves de fausse teigne, il ne faut que 10 à 15 jours pour détruire l'ensemble des rayons de la colonie.
  2. Si la nourriture manque aux larves de fausse teigne, le cycle de développement se rallonge jusqu'à plusieurs mois. Généralement ses larves sous nourries donneront des adultes de moindre vigueur, plus petits et de moindre espérance de vie.
  3. Enfin les larves peuvent passer l'hiver au sein de la colonie (elle dispose de sa propre chaudière : son métabolisme est en effet capable de produire une chaleur notable).

Pourquoi la fausse teigne apparaît ?

Passons sur les cadres de hausses stockés hors saison : si des œufs y éclosent, les larves ne rencontrent pas d'entrave à leur développement (sauf quand tout est mangé...). Intéressons nous aux colonies :

                                  

 Un vénérable apiculteur résumait cela joliment : " la fausse teigne ? une ruche en bonne santé, elle lui jette un sort ! ".

Normalement les ouvrières détectent en effet rapidement les larves (chenilles) de fausse teigne, les attaquent et les évacuent de la ruche. Le développement de la fausse teigne est permis si des zones de la colonie sont laissées sans surveillance, en d'autres termes s'il y a un déséquilibre entre la surface de cadres à couvrir et la quantité d'abeilles pour s'en occuper : pas assez d'ouvrières pour trop de cadres. Plusieurs cas de figure :

  • Naturel  : plusieurs essaimages consécutifs, qui parfois réduisent à peau de chagrin la population initiale.
  • Pathologique  : toute maladie (parasites, bactéries, champignons, virus, intoxications) qui affaiblit suffisamment la colonie la rend vulnérable à l'action - jusque là contenue - de la fausse teigne. On peut voir la fausse teigne comme un " charognard " : elle élimine les colonies malades ou mortes.

    Mais n'oublions pas quelqu'un d'incontournable : l'apiculteur ! L'apiculteur peut a son insu affaiblir ses colonies. Nous avons donc un troisième cas de figure :

    • Technique : les manipulations qui retirent des ouvrières (essaimage artificiel), rajoutent inconsidérément trop d'espace (retrait de partition, ajout de hausses) à surveiller pour les ouvrières font aussi les affaires de la fausse teigne ! La règle veut que la population d'abeille d'une ruche doit être capable de couvrir l'ensemble des cadres qui est mis à sa disposition.

         

         

    Les dégâts visibles :

    • En creusant dans la paroi des alvéoles, la Fausse Teigne peut restreindre l'espace disponible pour la croissance des larves puis des pupes. On suspecte que l'action de la Fausse Teigne soit ainsi responsable d'une anomalie parfois rencontrée lors de l'examen de la ruche : le couvain chauve ou couvain tubulaire. L'opercule manque et on ne voit qu'un bourrelet de cire autour de l'orifice de l'alvéole. Cette anomalie est également attribuée à des facteurs génétiques des abeilles et il n'est pas sûr qu'il s'agisse de l'action de la Fausse Teigne.

                                   

     

    • Au début de l'attaque , les rares signes visibles sont quelques opercules à la surface desquelles on trouve un fin réseau de soie :

                                       

     

    • Puis, si la colonie est trop faible pour se débarrasser de l'intrus, on trouvera rapidement des destructions de plus en plus spectaculaires. Des galeries, dont nous avons déjà parlé, dont la paroi est un mélange de soie, de débris de cire et des excréments noirs et rectangulaires de la larve de papillon. Un réseau de soie auquel adhère toute sorte de débris (alvéole, excréments...) envahit également la surface des rayons et les espaces entre les cadres :

     

                                        

                                         

      • Les larves de Fausse Teigne sont visibles, en plein travail destructeur, leur taille varie selon la nourriture disponible, leur âge. Les larves de Galleria melonella sont plus grosse que celles de Achroea grisella, la couleur de cette dernière est généralement plus rose. Des cocons, de taille variable selon l'espèce et la taille des larves sont également visibles. Ils sont fusiformes, légers (parce que souvent vides) et blancs. A gauche Achroea grisella, à droite Galleria melonella.

                               

                            

      • Assez souvent, les larves, au moment de tisser le cocon, rongent le bois des cadres et laissent l'empreinte du cocon dans celui-ci. S'il s'agit, comme c'est souvent le cas, du bois des cadres, les cadres sont fragilisés (risques de rupture lors des manipulations et lors de l'extraction). Sur ce corps de ruche abandonnée, on voit bien ces cavités fusiformes.

                                  

       

      A ce stade, les destructions sont extrêmement rapides et les rayons sont très vite réduits à un tas de débris.

       

      Les dégâts collatéraux

      La pression exercée sur les colonies d'abeille est permanente du printemps à l'automne. Les destructions de la fausse teigne précipitent la perte des colonies faibles et leur pillage par les colonies plus fortes or le pillage est avec la dérive des abeilles le principal mode naturel de transmission des maladies des abeilles (Loque américaine, européenne, varroase).

      Des études menées sur les excréments de fausse teigne ont montré que dans les colonies atteinte de Loque américaine, ceux-ci contiennent des quantités importantes de spores de Loque américaine.

       

      Lutte contre la fausse teigne : attention à ne pas faire n'importe quoi !

       

      • Concernant les colonies, nous l'avons vu, le meilleur moyen de garder la fausse teigne loin des rayons de la ruche est de veiller a avoir des colonies en bonne santé, avec une population suffisante pour le nombre de cadres à couvrir.

        Attention aux utilisateurs de planchers grillagés : il faut nettoyer le tiroir régulièrement, sinon des larves se développent sur les déchets : sur la photo ci dessous : parmi les débris en trop grosse quantité, des varroas (1), une larve de fausse teigne (2) sortie du tunnel protecteur de soie (visible autour) qu'elle a construit parmi les débris et ses excréments (3).

                             

         

      • Le problème de la conservation des cadres de hausse en dehors des périodes de miellée a conduit à l'emploi d'un certain nombre de méthodes plus ou moins recommandables. Commençant par une méthode encore malheureusement très répandue en France : les fameuses boules anti-mites !

       

      Les boules anti-mites

                                    

      Elles contiennent du PDCB : para-dichloro-benzène. L'usage voulait qu'on enferme les cadres dans une armoire ou autre lieu clos avec des boules anti-mites. Quelques semaine avant de poser les hausses, les cadres étaient aérés pour éviter de tuer les abeilles avec les vapeurs résiduelles de PDCB.

      Gros inconvénient : le PDCB s'accumule dans la cire, un transfert se fait ensuite entre la cire polluée et le miel que les abeilles y stockent, or le PDCB s'évacue très peu du miel., c'est un produit polluant et fortement suspect d'être cancérigène pour l'homme ! L'accumulation dans la cire est d'autant plus forte que les boules anti-mites sont nombreuses et ont été laissées longtemps.

       

      Lutte biologique

      Bacillus thuringiensis, bactérie largement utilisée en agriculture pour la protection des plantes, offre une bonne protection contre la fausse teigne. Elle secrète une toxine qui s'attaque aux larves de fausse teigne. Différents produits existent en apiculture, contenant une souche particulièrement nocive pour la fausse teigne. Bacillus thuringiensis est inoffensif pour les abeilles et l'homme et les animaux.

      Le principal inconvénient est qu'il faut pulvériser le produit sur tous les cadres (2 faces) : un peu fastidieux et onéreux...

      Vapeurs de soufre (anhydride sulfureux)

      L'anhydride sulfureux ne se dissout pas dans la cire : il présente donc un danger minime de contamination de la cire et du miel. Les vapeurs peuvent être obtenues par combustion d'un mèche soufrée (1 mèche pour 3 hausses DB à placer en haut de la pile de hausses à traiter, c'est un gaz lourd), ou en utilisant un spray de gaz sous pression en bouteille.

      Le soufre ne tuant pas les œufs, il est conseillé d'attendre 15 jours avant de faire le premier traitement, de répéter ensuite le traitement 15 jours après (certains conseillent toutes les deux semaines). Les vapeurs de soufre sont à la longue agressives pour les éléments métalliques des hausses et des cadres.

      Congélation 

      Très efficace, elle détruit tous les stades de fausse teigne, œufs compris. La durée minimale de congélation dépend de la température de congélation : de 2 heures à -15°c à 4,5 heures à -7°c (durées mesurées à partir du moment ou le cadre a atteint la température de congélation. Cette méthode nécessite cependant des infrastructures lourdes.

      Simple, propre et efficace : le courant d'air.

      Les larves de fausse teigne détestent les courants d'air. Pour en créer, on utilise l'effet cheminée : cette méthode consiste à empiler les hausses en colonne. Pour construire notre HLM (Hausses Largement Mitophobes), c'est très simple : de bas en haut :

                                              

      1 : des parpaings écartés les uns des autres pour éloigner la base de la pile de hausse du sol et de son humidité et laisser entrer l'air sous la pile.

      2 : un grillage fin : grille à reine ou grillage inox à mailles fines (type plancher aéré) pour empêcher les rongeurs de monter.

      3 : les hausses et leurs cadres empilés. Veiller à ce que les cadres soient bien espacés les uns des autres (sinon la ventilation est mauvaise et la fausse teigne commencera à se développer à cet endroit).

      4 : une autre grille.

      5 : un toit type chalet, avec un trou d'aération, pour protéger la pile de la pluie.

      Cette méthode donne de très bons résultats, elle est simple et facile à mettre en œuvre. Si le courant d'air n'est pas optimal, on peut constater quelques " départs " de fausse teigne, qui ne vont jamais très loin.



      28/01/2008
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